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Le blog de Jacques Krabal
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9 juillet 2006

70ème anniversaire du Front Populaire et des congés payés - Inauguration du Parc Léo Lagrange

Pourquoi nous retrouvons nous ici ce matin ? La réponse est évidente: bien sûr pour fêter le soixante dixième anniversaire du Front Populaire, mais aussi des congés payés, et le rôle de Léo LAGRANGE alors sous secrétaire d’Etat aux Sports et aux Loisirs. Cet homme à qui nous avons voulu donner le nom de ce parc, mort dans l’Aisne, fut le promoteur essentiel des sports et des loisirs, dans cette période particulière de l’histoire sociale et politique de notre pays. Période considérée, à juste titre, exceptionnelle en transformant radicalement les modes de vie de nos parents, en mettant en œuvre des acquis sociaux toujours d’actualité, et régulièrement remis en cause

Je ne vais pas développer tous ces aspects. Des historiens, gardiens de notre mémoire locale comme Michel MAILLARD, Tony LEGENDRE, Pierre LEMRET, Jacques DESSALANGRE, Député de l’Aisne pourront s’exprimer sur tous ces points. Mes chers amis, élus, citoyens qui que vous soyez, vous pourrez nous faire part, si vous le désirez, de vos réflexions sur cette époque et sur 1936, mais aussi sur celle que nous vivons. Ces anniversaires sont l’occasion de redécouvrir, nous replonger dans notre histoire, avec les discours de Léon BLUM, que nous fera revivre Nicolas JOBERT. Se souvenir des faits, avec des départs de congés payés mis en scène par les « Troubadours de l’Omois » des évènements comme l’exprime cette exposition.

Je tiens à remercier tous ceux et toutes celles qui ont participé à ce rendez-vous populaire. Alors plongeons nous dans la vie des gens de cette époque avec notre guinguette au bord de l’eau. Imaginons ce qu’était la vie d’un travailleur, d’une travailleuse en 1935, une semaine de travail de 48 ou 50 h. juste le dimanche pour se reposer un peu…. Avant de retourner au labeur. Il arrivait bien quelquefois que l’on fête la «Saint Lundi », c'est-à-dire que l’on oublie d’aller « au charbon » ce matin là. Mais c’était risquer le licenciement et le chômage. Et puis bien évidemment pas de congés payés, c'est-à-dire le travail du 1er Janvier à la Saint Sylvestre. Comme vous le savez pour le Front Populaire tout a commencé le 2 Mai 1936, avec des grèves dans les usines d’aviation, d’automobiles et de textiles. Des occupations des lieux de travail, ces grèves sur le tas s’accompagnaient de fêtes, on dansait dans les cours d’usines, comme celle de l’imprimerie moderne de Château-Thierry dont nous parleront peut-être Tony LEGENDRE et Pierre LEMRET. Et puis bien sûr il y eut la victoire du Front Populaire aux élections législatives.

Il faut rappeler que les partis de gauche s’étaient engagés séparément dans la bataille électorale. Ce qui n’a a pas empêché les radicaux, les socialistes de se rassembler et de former, avec le soutien du parti communiste: le Front Populaire pour aboutir au gouvernement de Léon BLUM, le 4 Juin. C’est Maurice THOREZ, dirigeant communiste qui compte tenu de la situation sociale et économique appelle à la formation d’un Front Populaire. Alors, rapidement se mit en œuvre une « Révolution par la loi », augmentation des salaires de 7 à 15%, avec une augmentation plus élevée des bas salaires, mais aussi le droit syndical, la protection sociale et puis bon nombre d’autres mesures au rang desquelles la semaine de 40 h. et les 2 semaines de congés payés, qui fût votée par 563 voix contre 1, en sont les plus emblématiques.

Et aujourd’hui, où en sommes-nous ? Bien sûr les luttes ouvrières ont amélioré ces acquis, les congés payés sont passés à 3 puis 4 semaines, auxquelles s’est ajoutée une semaine d’hiver. Et pourtant 70 ans après l’avance sociale majeure que fut la loi sur les congés payés, le droit aux vacances n’est pas une réalité pour tous. Les vacances sont toujours un luxe. Comment pourrait-il en être autrement quand nous constatons une stagnation du pouvoir d’achat ? Des salaires désespérément bas. Comment un « smicard », un retraité, un chômeur, un « Rmiste » peut-il s’offrir des vacances aujourd’hui, compte tenu du coût des transports (carburant), des locations, etc…

En effet la crise économique aidant, les plus démunis, mais aussi les jeunes ( 1 enfant sur 3), et les classes moyennes en sont de plus en plus exclues. 40 % des familles ne partent pas en vacances, voilà une véritable question de société fondamentale, que nous devons poser aujourd’hui à l’occasion de cette réflexion sur cet anniversaire, et cette question mériterait de mon point de vue, d’être prise à « Brasles le corps » par les politiques.

En dépit des diverses aides et actions de solidarité, il faut reconnaître et dire que la joie des vacances n’est toujours pas le lot commun. Nos quartiers des zones les plus urbanisées ne se vident pas durant la période estivale. Il faut bien comprendre qu’en plus de la privation que cela représente, en terme d’accès à la culture, au repos, c’est une stigmatisation supplémentaire dans une société qui considère, à juste titre, cet acquis comme évident. Les dispositifs existants se révèlent insuffisants ou inadaptés, les soutiens publics aléatoires et disparates.

Bien sûr, il existe les chèques vacances, mais ils ne sont pas diffusés dans tous les secteurs professionnels. Ces dispositifs rencontrent des difficultés pour pénétrer les P.M.E., et puis là encore, les chômeurs, les retraités, les Rmistes en sont exclus. Le Directeur de la C.A.F., présent jeudi dernier, reconnaissait que le budget consacré au départ des enfants en vacances a fortement diminué ces dernières années. Il y a même des suppressions de bons vacances dans certaines caisses d’allocations familiales.

Les politiques de l’Etat ne sont pas au rendez-vous de l’accessibilité aux vacances. Je considère que cette absence de l’Etat est dangereuse, on ne mesure pas ce que veut dire de laisser en déshérence des gens qui voient les autres partir. L’éviction des loisirs est vécue comme une double peine.

Une politique sociale des vacances est un élément essentiel de notre politique sociale globale. Mais il y a un tabou, on hésite à mettre en avant, même aujourd’hui, le droit aux loisirs. Comme si, avec le chômage, la précarité, c’était faire l’apologie de la paresse. De ce côté-là, le regard de certains n’a guère évolué : le ministère de Léo Lagrange n’était-il pas qualifié par la Droite et l’Extrême Droite de ministère de la paresse ! Pour moi, pas de réticences, nous devons proposer une politique de loisirs pour tous comme l’un des éléments d’une vraie politique éducative et sociale.

« Pour grandir, les vacances, les loisirs, c’est aussi important que la soupe », selon les propos d’un journaliste du secours populaire. Le droit aux vacances existe sur le papier, il convient de le faire exister dans la vie. Il faut intégrer les loisirs comme un des paramètres essentiel du lien social et du vivre ensemble. Pratiquer des loisirs, c’est exister en dehors de son statut professionnel, de son statut social. C’est un outil de lutte contre l’exclusion, parce que dans une activité de loisirs l’homme prend conscience de ce qu’il est, il retisse des liens, il découvre, il s’investit, il s’affirme, il s’invente. Alors oui à une véritable politique de loisir, de tourisme et de vacances. N’oublions pas, en plus de la portée sociale, la portée économique que pourrait générer une politique qui se fixerait comme objectif des vacances et des loisirs pour tous. Le tourisme est le premier poste de revenus en solde net, avec 1 million d’emplois, plus 1 million d’emplois saisonniers. Et là nous sommes dans l’emploi durable non délocalisable. Le tourisme rapporte plus que l’agriculture et la pêche réunies, et certaines années autant que l’industrie automobile.

Comme vous pouvez le constater cet anniversaire n’est pas ici seulement une grande commémoration du souvenir. Il aurait dû être l’occasion de voir tous les partis politiques et surtout ceux de gauche, s’engager dans de véritables propositions. C’est d’ailleurs la demande des Fédérations d’Education Populaire, qui, surtout à la veille d’échéances électorales majeures attendent, non seulement des propositions, mais surtout des engagements forts. Mais force est de constater que les partis sont plutôt timides.

Au-delà des manifestations symboliques, montrons notre attachement à renforcer l’œuvre sociale du Front Populaire, les valeurs de Léon BLUM et Léo LAGRANGE. N’ayons pas peur, non seulement de nous battre pour défendre les conquêtes sociales durement acquises au fil des temps et souvent remises en causes, mais soyons offensifs, osons avoir une ambition pour celles et ceux qui souffrent. N’oublions jamais que pour le pouvoir en place et les patrons de 1935, rien n’était possible pour les ouvriers. Quelques semaines après, l’impossible était devenu possible et réel. Alors pourquoi ce qui était vrai hier ne pourrait plus l’être demain. Gardons toujours présent dans nos têtes que « ce sont toujours ceux qui ont beaucoup, qui trouvent que ceux qui ont peu, ont trop » !!

Bien sûr, si les temps ont changé, nous constatons qu’au delà des progrès sociaux accomplis depuis 70 ans les problématiques politiques sont les mêmes. 1936, c’est le résultat d’actions politiques volontaires.Alors pour faire bouger notre société pour qu’elle soit plus juste, plus une humaine, il faut retrouver l’espoir en la politique, politique comme celle mise en œuvre par le Front Populaire, qui a trouvé sa force et sa légitimité dans la mobilisation d’une grande partie de la société. C’est cette implication populaire, mais aussi le respect du peuple, qui ont permis toutes ces avancées rappelées aujourd’hui. Mais pour aller plus loin demain dans la construction d’un monde plus fraternel, il n’y a pas d’autres voies. Ecoutons le peuple, prenons en compte ses attentes, et surtout respectons le. Voilà le message qui nous est transmis par cet anniversaire. Sachez qu’ici à Brasles cette volonté est en nous, ce Parc Léo LAGRANGE en est l’expression concrète. Comme vous pouvez le constater, le droit aux loisirs est une réalité. Mobilisons nous pour que le droit aux vacances n’existe pas seulement sur le papier ou dans les discours, mais ensemble, faisons-le entrer dans la vie de tous.

Merci d’avoir bien voulu partager cette journée avec nous et bonnes vacances. Des vacances ensoleillées, chaleureuses et solidaires pour tous.

   

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